Notre rubrique "bande dessinée" est à nos yeux la première, parce que cet art est à l'origine de notre rencontre. Nous espérons que vous partagerez nos coups de cœur en la matière.

Mais la bande dessinée n'est pas une passion exclusive. Rendez-vous dans les autres rubriques, accessibles depuis la colonne d'orientation, à votre droite.

jeudi 14 octobre 2010

L'Appel (Laurent Vicomte)

Sasmira, tome 1

Une vieille femme meurt doucement, sous un porche de l'Ile de la Cité, dans les bras de Stan, le héros de cette série. En répondant à son étrange supplique, le jeune homme n'imagine pas qu'il embarque pour un extraordinaire voyage, sur les traces de la mystérieuse Sasmira. Il entraîne dans son périple, bien malgré lui, la jolie Bertille, sa petite amie...

Cet album est une véritable énigme. 11 ans après sa parution, il est réédité avec une nouvelle couverture, aux éditions Glénat. Est-ce le signe qu'un tome 2 pourrait paraître prochainement ? Pour qui, comme moi, a découvert cet album lors de sa sortie en 1997, ce serait une bonne nouvelle... Internet donne certains indices : en 2005, une interview de Vicomte permettait d'espérer la sortie du tome 2 pour 2006. En 2008, l'annonce de la réédition du tome 1 chez Glénat a provoqué de vives réactions chez certains lecteurs, attendant la sortie du tome 2... prévue, selon l'éditeur, pour 2010...
Mais pourquoi donc cet album fait-il couler tant d'encre ? Par de nombreux côtés, "L'Appel" est assez proche de la "Ballade au Bout du monde", écrit par Makyo et dessiné par Vicomte, justement (pour les 4 premiers tomes de la série qui en compte 12). Le thème principal tel qu'il apparaît dans ce premier volume est en effet le même : le voyage dans le temps.
Le graphisme également, très soigné, rend la parenté entre les deux séries évidentes (les deux séries sont contemporaines, ceci expliquant cela bien entendu). Il serait inutile et dangereux d'aller plus loin dans les comparaisons : il faudrait pour cela avoir plus de matière.

Le dessin est précis, réaliste, fouillé. Le jeu des couleurs et des ambiances est intéressant, sans être aussi sombre que dans la "Ballade au Bout du monde". Le jeu des lumières et des regards donne toute sa force au récit, et rend certaines scènes inquiétantes, angoissantes, ou, au contraire, apaisantes et heureuses. Graphiquement, c'est donc une merveille...
Le rêve et la réalité se mêlent, la frontière qui les sépare devenant plus floue au fil des pages. Bertille semble être en mesure de se révolter, et a l'air de ne pas avoir été "envoûtée" comme Stan. Mais elle semble par ailleurs liée à cet endroit... Pourra-t-elle en sortir ?

Cet album ressuscite les débuts du XXe siècle, et à ce titre, c'est un vrai régal pour les yeux. Le mystère qui entoure Sasmira est épais, et mêle l'enquête au mythe, avec l'évocation d'un Orichalque. A ce stade de l'intrigue, le lecteur ne peut que conjecturer : la vieille femme et Sasmira sont-elles une seule et même personne ? Sans doute... Mais alors, la vieille femme est très âgée... Tellement âgée que cela n'est pas possible, sauf si l'Orichalque y est pour quelque chose, ce qui expliquerait les boîtes de conserve sur la photo de la dernière page... Mais quel rapport avec la Pyramide du Louvre ? A moins qu'elle ne soit encore plus âgée qu'il n'y paraît ?
Les personnages secondaires sont aussi porteurs d'interrogations, bien sûr : Qui peut donc bien être l'imposante Mademoiselle Prudence ? Quel secret cache-t-elle ? Comment Stan et Bertille vont-ils retrouver l'année 1996 ? Le pourront-ils ? Le voudront-ils ? Ou plutôt, Stan le voudra-t-il ? Quel lien y a-t-il (si lien il y a, comme semble le suggérer ce premier tome) entre la jolie Bertille et l'envoûtante et mystérieuse Sasmira ?
La suite, monsieur Vicomte ! Vivement la suite !

Paru aux éditions Les Humanoïdes Associés, Genève, 1997. ISBN : 2-7316-1126-x.
Réédité aux éditions Glénat, Paris, 2008. ISBN : 978-2-7234-6586-1.

mercredi 6 octobre 2010

Le Dernier chant des Malaterre (François Bourgeon)

Les Compagnons du Crépuscule, tome 3

Ce troisième volet de la série "Les Compagnons du Crépuscule" tranche très nettement avec les deux précédents.
Sur la forme, d'abord. Les deux premiers volumes font 52 pages (hors annexes), celui-ci en compte 142. D'autre part, alors que les deux premiers se lisent d'une traite, et sont complémentaires l'un de l'autre, ce troisième volet se décompose en 4 parties et peut être lu indépendamment des deux premiers tomes.
Le ton également est très différent : du mythe et de la légende, du rêve éveillé des deux premiers volumes, le lecteur est transporté dans la réalité brute d'une ville du Moyen-Age avec ses violences, ses traditions, sa brutalité, sa beauté aussi.
Le dessin de Bourgeon se fait encore plus fouillé, fourmillant de détails, de personnages, de lieux variés et riches, d'atmosphères apaisantes, ou au contraire brutales, angoissantes, oppressantes.
Le lecteur retrouve ainsi Mariotte, Anicet et le mystérieux Chevalier sans nom, poursuivant sa quête. Mais il fait aussi la connaissance de multiples personnages, rendant l'histoire touffue, complexe aussi, et passionnante.
Dans cet univers, les légendes et les superstitions ont encore toute leur place, mais d'une manière très différente, beaucoup moins onirique que dans les tomes 1 et 2.
Une réplique de Mariotte (planche 25, case 11), l'exprime d'ailleurs très bien : alors que le Chevalier lui raconte l'histoire d'un moine qu'il a rencontré, elle accepte de l'accompagner, alors qu'elle pressent un danger, et ce "Bien que nous fassions de moins en moins les même songes."
Il n'est effectivement plus question de rêves, ici, mais de la brutale réalité : le Chevalier est arrivé sur le lieu de sa quête, il a trouvé le royaume de la Force Noire, et cette Force Noire a un visage...
Cet album est en définitive bien plus classique que les deux précédents (si tant est que Bourgeon peut écrire quelque chose de classique) : une intrigue, des complots, des ennemis à combattre, une femme à sauver, un Chevalier qui n'a rien à perdre... Il est passionnant : un foisonnement de détails, des personnages hauts en couleurs, une intrigue complexe à rebondissements en font un excellent album. L'utilisation d'un pseudo ancien français (car écrit en français d'aujourd'hui, mais utilisant des expressions, mots et tournures anciennes), rend la lecture parfois ardue, mais ajoute aussi au mystère...
Le seul bémol vient sans doute de cette différence de ton, de cette cassure qui s'opère : il manque ici la magie, le délire, la drôlerie aussi, des deux premiers volumes. Celui-ci se veut plus sombre, plus réaliste...
C'est certainement voulu : la différence de ton est tellement flagrante qu'elle rend par elle-même les deux premiers albums comme irréels...
Si c'était bien là le but de François Bourgeon... alors : "Chapeau bas, l'Artiste !". C'est finalement un peu comme si le lecteur avait, lui aussi, rêvé...

Paru aux éditions Casterman, 1994. ISBN : 2-203-38830-7.

dimanche 1 août 2010

Usagi Yojimbo (Stan Sakai)

Couverture d'Usagi Yojimbo 16, © Darkhorse-comics


Au mois de mars 2010 paraissait en France le vingtième tome d'Usagi Yojimbo (littéralement : "lapin garde du corps"), qui fêtait dans le même temps ses 25 ans de parution aux Etats-Unis. Créé par Stan Sakai, un américain d'origine japonaise, ce drôle de personnage mérite largement cet article. C'est en effet un des rares comics qui soit édité en format manga, à un prix extrêmement intéressant (bien plus abordable que la version originale !).

Cette oeuvre vaut la lecture. Non seulement parce que c'est la seconde série, par sa longueur, réalisée par un même auteur/dessinateur dans l'histoire de la bande dessinée américaine (plus de 200 fascicules de 22 pages), mais aussi et surtout pour l'histoire elle-même : on y suit les pérégrinations de Miyamoto Usagi, ancien samouraï devenu ronin qui vend ou échange ses services pendant ses voyages. Usagi est un lapin anthropomorphe, comme d'ailleurs tous les personnages créés par Sakai, et qui évolue dans un japon moderne (environ au XVIIe siècle), que l'auteur essaie de rendre réaliste, tant par sa description de la société et des moeurs, que par celle des évènements historiques. Mais Sakai n'hésite pas aussi à faire référence, dans son univers, à différentes légendes qui peuplent le Japon médiéval et moderne : démons et autres ninjas apparaissent à l'occasion, et occupent parfois une large place dans l'intrigue.

Usagi n'est pas le seul a être né de la plume de son auteur : autour de lui évolue toute une galerie impressionnante de personnages secondaires, que le lapin croise et recroise au fil de ses aventures : Gen le chasseur de primes, Tomoe la samouraï, Katsuichi le vieux maître, Kitsune la pickpocket, Mariko l'amour d'enfance... la liste pourrait s'allonger presque sans fin. Tous ces personnages ne cessent d'évoluer en même temps que le héros, et ont parfois droit à une histoire qui leur est entièrement dédiée. Ainsi, les aventures d'Usagi Yojimbo suivent l'exemple des comics plus classiques : elles forment toutes des chapitres d'une plus grande histoire, et les intrigues développées pendant plusieurs années se rejoignent parfois dans une longue épopée d’une dizaine de numéros.

L'autre grande force de Sakai est son dessin : épuré, son style convient parfaitement à son histoire. Il se détache également totalement du style japonais pour être totalement dans la lignée des Américains, même s'il a choisi le noir et blanc pour conter les aventures de son personnage.

Enfin, cette série est également célèbre pour ses nombreuses interactions avec d'autres univers, dont celui du célèbre quatuor des tortues ninjas (qui ont été crées à peu près en même temps qu'Usagi, au milieu des années 1980). Les apparitions des personnages dans d'autres univers que le leur sont légion, que cela soit dans les bandes dessinées d'Usagi ou des tortues, et même dans le dessin animé des Tortues Ninjas.

En bref, voila une excellente série, publiée à petit prix en France par les éditions Paquet qui font un travail superbe (bien qu'au prix d'une réduction de la taille des planches originales), et qui séduira tous les publics (par exemple, la violence, bien que présente, n'est jamais montrée crûment).


Un exemple de planche sur le site de Paquet : http://www.paquet.li/paquet/admin/album/img/exemple/20100210120043.jpg

Site des éditions Paquet (français) : http://www.paquet.li/paquet/serie.php?id=90
Site des éditons Dark Horse (anglais) : http://www.darkhorse.com/Zones/Usagi
Site de Stan Sakai (anglais) : http://www.usagiyojimbo.com

Paru aux Etats-Unis aux éditions Fantagraphics (jusqu'en 1996), puis Dark Horse, depuis 1996, ISBN du premier tome : 0930193350
Paru en France aux éditions Paquet, depuis 2005, ISBN du premier tome : 2940334988

vendredi 30 juillet 2010

Les Yeux d'étain de la Ville Glauque (François Bourgeon)

Les Compagnons du crépuscule, tome 2.

Dans le premier volume, le rêve et la réalité se confondent.
Ce deuxième tome de la trilogie "Les Compagnons du Crépuscule" commence comme le premier. La guerre, les tueries, le malheur, la vengeance... Les procédés sont les mêmes, le dessin est toujours aussi dur, mais aussi de plus en plus beau. Cette fois, on est clairement en Bretagne. Pour qui connaît un peu la côte, il est relativement facile de situer les scènes du début à la Pointe de la Torche, dans le Finistère Sud.
Comme dans le premier tome, la réalité fait place au rêve, à la magie, à l'étrange. L'angoisse est bien présente, à mesure que l'on s'approche de la Ville Glauque... Avec un élément en plus : ce n'est pas une, mais deux histoires qui sont racontées.
Dans cet album extraordinaire, François Bourgeon retourne aux sources de la culture bretonne, et met en images le Chant des Séries, l'un des textes les plus anciens et les plus mystérieux du patrimoine breton. Si ancien que plus personne ne sait ce que signifient ces séries. Chant initiatque ? Formules druidiques ? Le Druide et l'Enfant du Chant des Séries guident les héros dans leur quête, depuis le fond des âges...
De nouveaux personnages se joignent aux héros errants rencontrés dans le premier volume, et Mariotte prend une place plus grande. François Bourgeon aime les femmes, et comme dans Le Cycle de Cyann ou Les Passagers du Vent, c'est ici par une femme, plusieurs en réalité, que vient le salut.
Un album où l'on touche à l'horreur, au mystère et au merveilleux.

Lire ici notre critique du tome 3.

N.B.: cette édition comporte 7 pages de croquis et de textes qui reprennent, en Français, le texte du Chant des Séries.

Paru aux éditions Casterman, Paris, 1985. ISBN : 2203388110

jeudi 3 juin 2010

Le Sortilège du Bois des Brumes (François Bourgeon)

Les Compagnons du crépuscule, tome 1.

Cet album est le premier d'une trilogie intitulée "Les Compagnons du crépuscule".
La première page donne à croire qu'on entre dans une fresque historique qui a pour cadre la Guerre de Cent Ans. Il n'y a pas de date, pas de lieu. Les trois tomes commencent à peu près de la même manière, comme le récit d'une légende :
"Celle-ci aura, dit-on, duré cent ans...
Rien ne la distingue vraiment de celle qui l'a précédée, pas plus que de celle qui l'a suivie...
Comme la grêle ou la peste, la guerre s'abat sur la campagne quand on s'y attend le moins. De préférence, lorsque les blés sont lourds et les filles jolies..."
L'histoire commence donc à la fin de l'été, dans la campagne. N'importe où. Peu importe : l'essentiel n'est pas là. Peu importe, puisque l'histoire raconte une quête, une marche, un mouvement. Il faut fuir les soldats, la mort.
Mariotte et Anicet, les deux "héros" de l'histoire, doivent leur salut à un mystérieux chevalier sans nom. Et sans visage. Maudit, il erre à la recherche de la Force Noire. De nuit, leur route les amène à traverser le Bois des Brumes.
Rêve ? Réalité ? Légende ou conte, comment savoir ? Cette nuit se transforme en quête, pour sauver leurs vies...
Le dessin de François Bourgeon est particulier, et pour ma part, il m'a gênée. Brutal. Violent. Acre. Mais ce qu'il raconte n'est-il pas aussi brutalité, violence ? Le jeu des couleurs et des ambiances accompagne un texte parfois cru, souvent drôle, plein de poésie et de féérie.
Ce premier volume pose les jalons de l'histoire. Les héros n'en sont pas. Le Chevalier est un vil meurtrier assoiffé de sang, son "valet" n'est qu'un couard et Mariotte est responsable à elle seule de la destruction d'un village entier et de la mort de tous ceux qui l'habitaient. Ils sont maudits. Ils n'ont rien à perdre, ils n'ont pas le choix, il leur faut avancer. Vers l'inconnu, la mort, peut-être.
Cette bande dessinée met aussi en scène un peuple de lutins, de petits êtres dont les archéologues ont retrouvé des traces lors de fouilles en divers endroits, de la Bretagne à l'Allemagne, et jusqu'en Egypte.
Bons ou mauvais ? Animaux ou humanoïdes de petite taille ayant disparu de nos jours ? Et si ces êtres avaient existé et étaient à l'origine des lutins de nos légendes ?
Au fil de la lecture, certains indices permettent de situer l'action : le langage utilisé, en particulier, donne à penser qu'on pourrait être en Bretagne... Le lecteur ne peut que conjecturer...

Pour voir la critique sur le tome 2, c'est ici. Pour le tome 3, cliquez ici.

N.B.: cet album comporte 7 pages de croquis et de textes sur les recherches concernant ce que les archéologues ont appelé "l'animal de Tollund", qui ont servi de base pour les lutins de l'album.

Paru aux éditions Casterman, Paris, 1983. ISBN : 2203388102

dimanche 18 avril 2010

Bone (Jeff Smith)

1991-2004 : 13 ans pour produire un chef-d'œuvre, tel pourrait être le résumé des 1300 pages de Bone, au vu de l'impression qu'on a quand on referme ce magnifique ouvrage. Jeff Smith y a ciselé tout au long des 55 fascicules qui le composent une histoire impressionnante, oscillant entre fantasy et merveilleux, peuplée de personnages hauts en couleur (ce qui, pour une publication en noir et blanc, tient de l'exploit), se mouvant dans un univers créé à leur mesure.

Qu'est ce que cela raconte ? On suit l'histoire de Bone (petit personnage dont le nez proéminent est la caractéristique principale), fort sympathique, mais qui a le défaut d'avoir un cousin, Phoney Bone, qui ne peut s'empêcher de faire de petites affaires ... ce qui les conduit, avec leur autre cousin Smiley Bone, à se faire exiler de Bonville ! Perdu en plein désert et séparé de ses cousins, Bone pénètre dans une vallée, évite l'estomac de deux rats-garous grâce à l’aide d’un dragon rouge, et se lie d’amitié avec les animaux d’une forêt. Jusqu’à ce qu’il rencontre une jeune femme, Thorn, qui semble destinée à tout autre chose que finir sa vie dans la petite maison de sa grand-mère ...
Entre courses de vaches et batailles épiques, entre course poursuite dans la forêt obscure et prophétie mystérieuse, entre héritages dramatiques et rêves mobydickiens ... l'histoire ne cesse d'avancer et de surprendre, ponctuée de situations comiques où Phoney (contre son gré) et Smiley jouent souvent les premiers rôles !

Pour découvrir tout ceci, l'avantage est aux anglophones : l'édition en un volume bat en effet tous les rapports qualités prix, rassemblant dans un seul ouvrage la totalité de l'histoire, dans son noir et blanc originel.
Pour les francophones, les éditions Delcourt ont publié la série originale en 11 volumes, puis les réédite actuellement en version colorisée, selon les volontés de l'auteur.
En bref, une série magnifique, à mettre entre toutes les mains, petits comme grands, avec un avantage non négligeable aux anglophones.

Le site de l'auteur (en anglais seulement)
Le page Delcourt consacrée à Bone

Paru aux Etats-Unis aux éditions Cartoon Books en 2004, ISBN : 188896314X
Parus en France aux éditions Delcourt, depuis 1995 ; ISBN du premier tome en couleur : 2756006598

Kenshin le vagabond / Ruroni Kenshin (Nobuhiro Watsuki)

Nous sommes au Japon, en 1878, au début de l'ere Meiji. Le port du sabre est interdit par la loi (sauf pour la police).
Kenshin le Vagabond est un rouquin aux cheveux longs qui ne passe pas inaperçu : il est roux, il arbore une cicatrice en forme de croix sur la joue, mais il porte aussi un sabre un peu spécial à
la lame inversée (le tranchant de la lame se trouvant au dessus du katana) : il ne peut donc pas tuer ses adversaires avec des techniques normales.

Dans son passé Kenshin était connu comme le Battosai, ce qui veux dire "maître dans le dégainage de l'épée". A l'époque, il était un hittokiri, un assassin au service du gouvernement. Mais les temps ont changé et il n'est plus l'assassin qu'il était. Il s'est juré de ne plus jamais tuer. Et il vagabonde de ville en ville, mettant son sabre au service de ceux qui en ont besoin.
L'histoire débute avec la rencontre de la charmante Kaoru. Il devient rapidement son homme a tout faire : cuisine, ménage, lessive, courses... Elle saura comment exploiter le jeune homme.
Il se fera aussi de précieux amis, comme Sanosuke, bagarreur hors pair, et Yahiko, jeune garçon orphelin qu'il sauvera de yakusa.
Le personnage de Kenshin est tout de suite très attachant. Il a du cœur et donne sans compter. Il cherche à ne plus renouveler les erreurs passées et tente de surmonter les épreuves qui s'imposent à lui. Le lecteur se trouve comme projeté dans l'histoire. Les dessins sont particulièrement détaillés et les villes semblent vivre au fil des pages.

Les combats au sabre ne sont en général pas longs, sachant que le but de Kenshin est de limiter les dégâts ; ils sont souvent agrémentés de dialogues ou Kenshin tente de comprendre son adversaire et de le raisonner.

Malgré la gravité des sujets abordés, l'humour n'est pas absent : l'auteur s'amuse souvent à comparer les personnages aux animaux, ce qui donne des situations assez comiques - surtout lorsque les filles se jalousent...
Ce manga est le premier de Nobuhiro Watsuki qui est paru de 1997 a 1999. Il a eu un succès rapide suscitant la parution de 28 tomes brochés, traduits en plusieurs langues.
Kenshin a inspiré une série télévisée d'animation de 95 épisodes. D'autre part, il existe des OAV (longs-métrages animés parus en vidéo) qui racontent la jeunesse du héros, correspondant aux "chapitres du souvenir" (tome 19 de la bande dessinée).


28 tomes parus en français aux éditions Glénat, collection Shonen, 1998-2003.
Édition originale chez Shueisha, 1994-1999

mardi 6 avril 2010

Le Journal d'un remplaçant (Martin Vidberg)


Mercredi 1° Septembre… c’est la rentrée des classes pour les instituteurs… Pour Martin, la journée sera un peu différente : en tant que remplaçant, sa rentrée ne se fera pas à l’école mais à l’inspection pour connaître son école d’affectation. Ô joie pour Martin : aucun poste ne lui est attribué et va donc pouvoir commencer l’année dans son école de rattachement… mais pas pour très longtemps.
Jeudi 14 Octobre, Martin est catapulté (ou "désigné volontaire" dans le jargon de l'Education nationale) en I.R… Un institut de redressement pour élèves ultraviolents, succédant ainsi à deux professeurs qui ont craqué…

Si le dessin « patatisé » peut surprendre dans un premier temps, sa simplicité est en réalité un atout pour entrer dans ce journal de bord d’un instituteur parachuté dans un établissement pour lequel il n’a reçu aucune formation. Le lecteur suit, jour après jour, les tribulations de ce jeune instituteur qui doit faire face à la violence verbale et physique de ses élèves, à ses propres doutes sur son rôle et à l’échec en milieu scolaire tant pour ses élèves que pour lui. Cette histoire met en lumière les absurdités de notre système scolaire, inadapté pour ces élèves : l’important est de mettre quelqu’un « devant » les enfants, peu importe si cette personne a suivi une formation adaptée pour cette situation bien particulière qu’est l’I.R. Ces absurdités, ainsi que les préjugés que peut rencontrer le corps enseignant, sont d'ailleurs tour à tour dénoncés, sans pour autant tomber dans une quelconque caricature: le ton demeure pédagogue, avec une dose de recul nécessaire pour rester neutre.
L’auteur n’oublie pas que les premières victimes restent ces enfants dont on suit leur évolution au cours de l’année scolaire, avec leurs problèmes mais aussi leurs bons moments. Malgré la difficulté du sujet, on s’attache très vite à ces petits bonhommes en forme de patates… Le dessin et la typographie illustrent avec justesse le monde de l'enfance, avec un style simple mais toujours expressif, notamment pour les visages. Un livre très humain, plein d’espoir et de vie tout en restant réaliste, sans véritable « happy end » : mais après tout, c’est aussi ça la vie d’enseignant.



Avant d'être un livre, cette bande dessinée a été diffusée intégralement sur le blog de l'auteur. L'éditeur et l'auteur ont cependant décidé de laisser une partie des planches en lignes (environ 100 pages sur 160). Vous pouvez donc lire les premières pages tout à fait légalement sur le blog suivant. Les illustrations ci-dessus sont reproduites avec l'aimable autorisation de l'auteur, extraites du blog susmentionné.

Paru aux éditions G. Delcourt, Paris, en 2006. ISBN : 27560066416.

lundi 5 avril 2010

"Alix" de Jacques Martin dans les années 1960

Pour rendre hommage à Jacques Martin, cet article est dédié à ce que je conçois comme la meilleure période d'Alix, les années 1960. Quatre albums sont réalisés, Les Légions perdues, Le Dernier spartiate, Le Tombeau étrusque et Le Dieu sauvage, et encadré par La Griffe noire (fin des années 1950) et Iorix le Grand (début des années 1970).

C'est à cette période que je trouve le trait le plus intéressant pour représenter Alix et Enak : Martin a trouvé une façon personnelle de représenter ses héros, après les tâtonnements initiaux. Et surtout ses scénarios prennent vraiment un tournant qui m'a beaucoup plu. Dans Les Légions perdues, Alix est chargé de retrouver l'épée de Brennus, le Gaulois qui faillit prendre Rome, épée qui intéresse au plus au point Pompée, pour affaiblir César ... Dans Le Dernier spartiate, Alix tente de sauver Enak, prisonnier d'un groupe de Grecs désireux de s'affranchir de la présence romaine dans la péninsule hellène. Le Tombeau étrusque voit Alix retourner en Italie, où il doit faire face à la menace d'une secte étrusque adoratrice d'un dieu punique. Enfin l'intrigue du Dieu sauvage l'emmène en Cyréanaïque (Libye actuelle), affronter une menace divine, et retrouver de vieux adversaires...

Résistance à Rome, folie religieuse, enlèvements en tout genre, course poursuite, et défense jusqu’au bout, avec bons nombres de morceaux de bravoure à l’intérieur (le discours d’Alix dans le dernier spartiate est ainsi un modèle du genre), voila un concentré de tout ce par quoi Martin fait passer ses héros, pour le plus grand bonheur de ses lecteurs, sans cesser de référer à l’histoire romaine des dernières siècles avant notre ère.

C'est donc un véritable florilège d'aventures diverses, mais bien plus que ce que ces résumés presque lapidaires peuvent en dire, ce sont les personnages secondaires qui sont véritablement développés dans ces albums, qui donnent une profondeur que l'univers d'Alix n'avait pas jusqu'alors. Qu'ils soient des jeunes hommes compagnons d'Alix, comme Octave et Héraklion, des femmes (enfin !) comme Lidia et Adréa, ou des militaires récurrents, comme Horatius et surtout Galba... tous contribuent à donner un vrai relief aux aventures d'Alix. Et que dire des civilisations que le héros croise : Grecs du Ve siècle, Etrusques ou Gaulois en cours de romanisation, tous permettent de se sentir plus proche des temps antiques, simplifiés sans trop les trahir par Martin.

En bref, pour découvrir ou redécouvrir ce héros intemporel, ces 4 albums (auquel on peut sans mal rajouter La Griffe noire et Iorix le Grand) sont tout simplement parfaits, et sont à mon sens ce que Martin a pu faire de meilleur !

Parus aux éditions Casterman :
Les Légions perdues (prépublication dans Tintin en 1962-63, publication en 1965), ISBN : 2203312017
Le Dernier spartiate (prépublication en 1966-67, publication en 1967), ISBN :2203312041
Le Tombeau étrusque (prépublication en 1967-68, publication en 1969), ISBN : 220331205X
Le Dieu sauvage (prépublication en 1969, publié en 1970), ISBN :2203312076